Les logements des gardiens (1848 / 2015)

La première maison de gardien date selon toute vraisemblance de la construction du phare (1846/1847).

Le phare du Minou en 1873 de Jules Duclos – Gallica (bnf.fr)

Une succession d’aménagements ont été effectués sur ce bâtiment.

En 1876 les services des Ponts et chaussées font construire une seconde maisonnette pour le chef gardien.

En 1877 le gardien Cloatre, qui occupe la maisonnette la plus ancienne, doit se loger dans le voisinage car des travaux sont entrepris afin de refaire les enduits et de reconstruire en tuile sa couverture en ardoise en l’exhaussant de 0,50m pour la mettre au niveau de celle de la maisonnette du chef gardien Leveque contiguë du côté du fort.

Extension du logement (source archives 29 – section 25S915)

En 1887, l’administration des phares et balises provisionne une somme de 1.000 Frs pour la construction d’un hangar bûcher au phare du Minou.

En 1909 et 1920 le logement est réparé (toitures, portes, fenêtres, enduits intérieurs), les peintures sont refaites et il est entièrement désinfecté deux fois en 1923.

Les gardiens Kerros arrivent au phare du Petit Minou

En 1909, Yves Kerros, 47 ans, devient gardien du phare du Petit Minou. Il arrive du phare de l’Ile vierge à Plouguerneau où il a occupé les mêmes fonctions de 1902 à 1909; il était auparavant affecté au phare de l’ile Wrach (1895/1902).

Son épouse Angélina est gardienne de phare et assume seule la responsabilité du phare de l’île Wrach depuis le départ de son mari (1895/1911).

En 1911, Angélina a 40 ans elle rejoint son mari au Phare du Petit Minou en tant que gardienne.

Le couple s’installe dans la maison des gardiens avec leurs 5 enfants : Anna 18 ans, les jumelles Marie et Jeanne 15 ans, Léontine 12 ans et Marcel 3 ans.

Cette année là,12 familles, soit 40 personnes, vivent dans 8 logements différents sur le site du Minou.

Source Archives 29 – recensement 1911

Le logement ne paraît pas très humide, aux dires de l’ingénieur des Ponts et Chaussées. Les gardiens qui se sont succédés ne se sont pas plaints de leur conditions d’hébergement.

En juillet 1924 Monsieur Lambert, ingénieur des Ponts et Chaussée, décrit le logement des gardiens de cette façon :

« Le logement des gardiens du Petit Minou qui est situé à proximité du phare est un bâtiment sans étage de forme rectangulaire de 14 mètres sur 5 mètres avec un pan coupé à l’angle Nord Est.

Ce bâtiment est orienté Nord-Nord Ouest et Sud-Sud Ouest, la façade tournée vers l’Est, l’arrière et le côté Sud adossés aux rochers de la pointe du Petit Minou. »

« Il y a trois fenêtres de 89 cm de largeur et une porte de 1 mètre sur la façade. L’intérieur est divisé en quatre parties (cuisine, salle à manger 2 chambres) par trois cloisons transversales, un retour de cloisonnement formant entrée face à la porte. le mur arrière est doublé d’une cloison en bois.

Les rochers qui protègent l’immeuble atteignent plus des 2/3 de sa hauteur sur la face Ouest.

Le mur à 0,90 m d’épaisseur et une cloison en bois le double à l’intérieur. Un lavoir et une citerne jouxtent la maison. »

Source Archives 29 – Série 25S915

La tuberculose s’installe

En fin d’année 1923 les enfants des gardiens Kerros contractent la tuberculose.

Source Achives 29 – Série 25S915

En février 1924 le logement est déclaré insalubre.

À cette époque la tuberculose est la conséquence des logements insalubres, et de la méconnaissance des règles d’hygiène. Le personnel soignant ne dispose d’aucun remède ayant des effets sur cette maladie. Les seules armes sont l’éducation de la population à l’hygiène, l’isolement des malades, lorsque c’est possible, et le service de désinfection des lieux d’habitation. Mais, dans les milieux populaires difficile de sortir la population d’habitats insalubres et d’appliquer les conseils des infirmières. 

Les accidents de santé successifs survenus aux enfants Kerros n’ont pas été sans attirer l’attention de l’administration des Ponts et Chaussées, pour qui le logement est pourtant convenablement disposé, à l’exception que les fenêtres sont tournées à l’Est et que le soleil n’y pénètre que quelques heures par jour.

La famille Kerros reçoit un secours de 200 Frs, l’administration reconnaissant le mauvais état du logement de gardien et sa répercussion sur la santé de sa famille.

Les Ponts et Chaussées étudient plusieurs solutions pour remédier à l’insalubrité du logement :

  • Il y a quelques années il avait été proposé de placer le logement du gardien dans le fort mais la Marine consultée n’a donné aucune assurance que l’immeuble sera désaffecté. Il lui a été cédé récemment (01 janvier 1919) par le Génie. D’ailleurs le logement visé menace ruine et nécessiterait de grosses réparations. En outre il paraît préférable à tous points de vue de loger le gardien à proximité du phare (la maison du gardien de la batterie est celle de gauche).
le fort du Minou vers 1920 (extrait d’une carte postale)
  • L’étude pour l’ouverture de fenêtres sur l’arrière du bâtiment est abandonnée ; cela le rendrait inhabitable en hiver (pluies et embruns) et même pendant certaines périodes d’été ou le vent souffle très fort à cet endroit exceptionnellement exposé. L’ouverture d’une fenêtre sur la face Sud-Sud Ouest n’est pas possible à cause de la citerne qui borde l’immeuble.
  • Les ingénieurs envisagent d’aménager à l’Ouest un ou deux oeils de bœuf, sorte de gros hublots permettant une fermeture efficace et dont les vitres laisseraient passer la chaleur rayonnante du soleil l’été. Les gardiens ventileraient leur logement en les ouvrant. Toutefois la dépense leur paraît hors de proportion avec les résultats à en attendre.

Finalement Monsieur Lambert propose tout simplement de bonnes réparations aux enduits extérieurs, aux plafonds, à l’intérieur et une désinfection par vaporisation au formol pendant 48 heures.

A son retour de congé Yves Kerros doit déménager son mobilier, il logera au deuxième étage du phare

Finalement l’administration décide de l’ouverture d’une fenêtre côté Nord.

Yves Kerros cesse son activité et part en retraite le 01 octobre 1924, il aura été gardien de phare au Minou pendant 15 ans. Avant son départ il réalise un inventaire de ce qui se trouve au deuxième et troisième étage du phare.

Source les feux de la mer – Jean Epstein – 1946 – chambre du gardien du phare du Petit Minou
chambre à coucher (3ème étage) 30/09/1924
1 lit en fer avec sommier elastique
1 table de nuit en bois en mauvais état
1 table bureau en bois avec tiroir
1 chaise en paille en mauvais état
2 rideaux d’alcove en couleur
1 seau hygiénique
1 tableau de service
1 balai d’appartement en crin
1 brosse à cirer
1 traversin en bale
1 oreiller en bale
1 lampe de gardien
registres et instructions des gardiens, circulaires
1 seau émaillé
1 réveil matin
1 brosse de boulanger
chambre 2 ème étage 30/09/1924
1 table en bois avec tiroir (peint)
1 chaise en mauvais état
1 lit en bois d’une personne
Inventaire du 2e et du 3e étage du phare, source Archives 29 – Série 25S915

Quand les logements n’ont plus d’utilité …

Janine, la fille du gardien Kerfriden se rappelle avoir dormi dans le phare au premier étage. Elle nous donne quelques détails concernant cette pièce ou il y avait un beau parquet ciré, bien entretenu par son père. Elle se rappelle de quelques éléments du mobilier : « il y avait un cosy à gauche et à droite de la fenêtre, un bureau ancien et un fauteuil chaise en cuir avec un dossier clouté ».

« Mon grand-père a été gardien au Minou jusqu’en 1941. Il a fait valoir ses droits à la retraite, même s’il n’avait pas l’âge. En effet, les allemands occupaient la place. Mes tantes et ma mère étaient venues avec les enfants se réfugier chez lui. Quand il est parti c’est Clet Thomas qui l’a remplacé, ensuite c’est mon père qui est arrivé le 27 décembre 1956. Nous venions du Conquet, mon père étant aux Pierres Noires. Quand nous sommes arrivés nous avons été déçues ma sœur et moi en entrant dans la maison. Nous l’avons trouvée petite, vieille. Donc à gauche de la maison il y avait une buanderie dans laquelle il y avait le lavoir et le séchoir. Ensuite la maison se composait de 4 pièces. Une petite entrée, à gauche 2 chambres en enfilade. A droite 2 pièces en enfilade, la première nous l’utilisions comme salle a manger. Et au bout une cuisine avec le fourneau et un évier avec juste de l’eau froide. Pas de chauffage, pas d’eau courante. Par contre dans l’entrée accroché au mur un téléphone. A droite de la maison 2 dépendances. La première mon père l’utilisait pour le bricolage, pour stocker le charbon et les pommes de terre. Une porte ouvrait sur l’arrière et donnait sur les rochers, là il y avait la citerne et tout en haut les toilettes. La seconde dépendance était vide. On a habité cette maison jusqu’en1961. Mes parents qui avaient connu la maison du temps de mon grand-père m’ont dit que rien n’avait changé sauf la peinture, tout était peint en gris.

En mai 1962, nous avons été les premiers habitants de la nouvelle maison construite sur le terre plein du fort. Dans cette maison d’une surface d’environ 90 m2 nous avons apprécié le confort : 3 chambres, salle de bain, chauffage central.

Nous sommes partis à St Mathieu le 27 décembre 1967. »

Nouvelle maison de gardien

Jean Pierre Le Gall (Un gardien de phare du Petit-Minou – Les Vigies du Minou), dont le père a remplacé le gardien Kerfriden en 1968, nous raconte que derrière l’ancienne maison de gardien il y avait une réserve de bois ainsi qu’un petit local qui servait à élever des cochons qui étaient nourris par les restes de la cantine militaire de Toulbroc’h. Les gardiens avaient le sens de l’humour, ils avaient baptisé leurs cochons du patronyme de Pompidou et Mitterand. Il y avait également des brebis dont l’une répondait au nom d’Angèle ce qui faisait beaucoup rire les enfants du quartier.

Cette nouvelle maison a été occupée jusqu’en 2006. Jugée insalubre et régulièrement squattée la bâtisse sera détruite en janvier 2015

Nouvelle maison de gardien en cours de démolition, source : Le Télégramme du 30 janvier 2015

Comme d’habitude, n’hésitez pas à nous faire part dans les commentaires de vos témoignages sur les logements de gardien au Minou.

Remerciements

  • Alain Rioual
  • Nadine Curel,
  • Jean Pierre Le Gall
  • Janine Kerfriden

4 réflexions au sujet de « Les logements des gardiens (1848 / 2015) »

  1. Bonjour, Si cela vous intéresse j’ai pris toute une série de photos lors de la démolition de la maison du gardien et du transfomateur électrique attenant en 2015.
    Cordialement

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